Simon Caruso est de l’étrange espèce des illustrateurs. À chaud, on imagine un homme chevelu, mono tâche, asocial et rongeur de HB.
Une sorte de psychopathe du crayon de papier ou de l’encre de chine qui passerait son temps à faire l’homme araignée, à oublier de manger et à dormir sur ses planches, toujours prêt à dégainer une caricature ou un super héros.
Pour en avoir le cœur net, nous sommes allés observer Simon dans son milieu naturel. Nous avons eu la surprise de découvrir un homme presque normal, un bon père de famille à la conversation facile, amène et rythmée, dans un univers immédiatement familier. Nous avons remballé les idées préconçues, et écouté ce qui va suivre.
Une jeunesse à buller
Simon a 31 ans et a grandi avec Lucky Luke, Tintin et Astérix.
D’aussi loin qu’il se souvienne, il a toujours aimé dessiner et mettre sa vie en scène. Petit, le dessin était pour lui un mode d’expression naturel. Plus tard, il écrivait des nouvelles et des BD « pour faire marrer les potes », sans réaliser encore que certains en vivaient.
Avec Trondheim et toute la nouvelle vague BD des années 90-2000 (Sfar, Larcenet, Guarnido), il découvre que dessiner est un métier.
Il passe un bac littéraire option lourde « arts plastiques », puis va faire une année de mise à niveau à l’école Bellecour avant d’intégrer celle d’Émile Cohl à Lyon. Là, ses profs, dont certains ont dessiné les héros de son enfance, lui apprennent à désapprendre ce qu’il croit savoir.
Pendant 4 ans, il se bat comme un lion dans cette école très sélective qui enseigne avant tout l’humilité. Il s’habitue, lui qui avait jusque là la flemme chevillée au corps, à dormir 4 heures par nuit. Il apprend la sculpture, le dessin animé, anatomique, la peinture, l’illustration…puis se spécialise en dernière année dans l’édition. Il sort 13ème de sa promo (pas sur 14, nous a-t-il rassurés) et s’attaque à la vie avec la gnaque de ceux qui ont trouvé leur voie. Et qui dorment peu
Illustrations et (in) dépendance
Il veut être libre. Effectivement, plus on discute avec lui, moins on l’imagine dans un univers capitonné. Il veut « surprendre les gens, se surprendre lui-même, sortir sans cesse de sa zone de confort », et passer du coq à l’âne autant sur le sujet que sur la technique.
Il sera donc illustrateur indépendant, celui dont le dessin doit savoir s’effacer devant le message.
Pari gagné : il l’est depuis 8 ans.
Il a commencé par créer un logo, puis 2, puis 3. Et chaque création a fait ses petits. Aujourd’hui, il répond oui à toutes sortes de projets et finalise d’ailleurs l’invention de la journée de 36 heures. Heureusement, la vie de famille et la naissance de sa fille lui ont appris à reconsidérer son engouement systématique pour la nouveauté et les défis. N’est pas Shiva qui veut. Il cesse de travailler lorsque ses femmes sont là et s’y remet le soir quand ses chats sont gris. Et jamais l’inverse.
Pour les professionnels, il crée toujours des logos, des mascottes, des campagnes d’affichage, de la com sur vitrine, des vidéos, des crédits visuels, des dessins de presse… Les mairies aussi font appel à sa plume… De même que les écoles le font intervenir auprès de nos enfants. Pour les particuliers, il se charge de faire-part, de tableaux, de caricatures et même de BD…
On a bien saisi que se contenter du minimum perturberait son rythme biologique bien à lui.
Impossible de lui échapper
En réalité, nous avons tous déjà croisé son travail. Comme Monsanto ou l’ami Ricoré, toutes proportions gardées, il est dans nos vies sans que nous le sachions. Mais il est bien entendu des intrusions plus illuminées que d’autres. C’est Simon qui, par exemple, se charge de l’illustration évolutive de la vitrine de « Destination Terre de Jeux », des cartons à pizzas du restaurant « Les Anges », de l’affiche du « Roi Lion » pour la compagnie « Côté Cour », ainsi que de la pochette du dernier album de Chopin. Les plus pointus auront croisé quelques unes de ses affiches alternatives de grands films (entendez: affiche non-officielle à travers laquelle un artiste donne sa propre vision du film) sur certains sites spécialisés (« Hero Complex Gallery », « Firebox »…), vu son expo en cartes à gratter… C’est à peine plus qu’un bruit qui court, mais pendant qu’il apparaît dans le dernier artbook ARTtitude consacré aux artistes du site PosterSpy, ainsi que dans un livre hommage à THE THING de John Carpenter (sortie en juillet pour le Comic Con de San Diego), nous devrions voir son nom au générique du prochain jeu de société de chez Gigamic… Rendez-vous au mois de mai (et chez Terre de Jeux).
L’atelier
Cela fait maintenant 2 heures que nous buvons du thé aux fleurs, un chat gigantesque sur les genoux, un autre à nos pieds attendant son tour, en écoutant Simon et Freddie Mercury. Il nous manque l’atelier au bout du couloir. Gonzague et Sigismond (les noms de scène des félins) nous escortent. C’est là qu’ils se vautrent chaque nuit et s’échouent sur les planches. Plusieurs univers se côtoient sur les étagères : DVD, CD, crayons et matériel à dessin bien sûr, une bio de Neil Young, des photos de famille joyeuse, des Stephen King, du Tolkien, un monsieur patate anonyme et un monsieur patate Dark Vador, une brosse à dents, Blacksad, Matisse, Mickey, Klimt… Oh! C’est pas bientôt fini ce bordel?? Même une chatte n’y retrouverait pas ses petits ! Fort heureusement, Simon n’a que des mâles et dans le monde animal, ceux ci réclament rarement la garde de leurs rejetons. Puis il nous montre ses créations, bien au chaud dans leur carton kingsize, et nous nous disons, rassurés, que ses illustrations valent bien un peu de ce doux désordre.
Nous avons vu ses fameux vinyles en cartes à gratter, que nous n’avons pas eu le droit de gratter, ses tableaux aux lignes géométriques, son affiche alternative des Dents de la Mer, son hommage à Batman en route pour Las Vegas (Parano), ses cartes de vœux « Chats-Pîtres »… Simon est un pêle-mêle de styles, une centrifugeuse d’idées.
Et nous sommes heureux d’avoir découvert la matrice, bercés par des chats ronronnant, de cet harmonieux mélange de genres.
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