Restaurant Gastronomique
Installés au soleil, un verre de vin couleur or-vert à la main, nous détaillons sous toutes leurs coutures des prémices salées qui semblent nous dire «vous allez déguster». Dans le cadre idyllique du Château d’Origny, nous voilà dans la peau de critiques gastronomiques, à prendre des notes et chercher les bons mots, quand tout nous appelle à «vivre sans temps mort, jouir sans entraves». Tandis que le Chef Sommelier et Maître d’Hôtel Jean-Noël Rahmani nous décrit ces amuse-bouches délicats, arrive alors ce qui doit arriver : au diable l’article à écrire, la posture professionnelle ou l’ambiance pince-fesse (qui n’est pas). Place au plaisir, à l’appétit, à la légèreté, à la kiffance même! Nous ne sommes ni Henri Gault ni Christian Millau. Juste des gourmands invétérés qui possédons d’immenses dispositions pour le bonheur que d’autres créent pour nous. Ces «autres», justement, nous invitent à passer à table dans la salle à manger donnant sur la cuisine du Chef Julien Laval. Lui et sa brigade s’affairent pour nous, la moindre des politesses est d’observer leur ballet silencieux.
La terre vue du ciel
Confortablement attablés, nous savourons déjà l’ambiance suave et raffinée de ce nouvel haut-lieu de la gastronomie roannaise. Afin de parfaire l’expérience, nous optons pour un «accord mets-vins» que nous n’allons pas regretter car, de découvertes en subtilités, d’opulence en minéralité, le Chef Sommelier va nous emmener loin. Très loin. Et le voyage commence. L’Œuf Parfait de la Cocotte Roannaise d’abord, avec artichauts violets cuits en barigoule et jus safrané, éveille la curiosité autant que l’envie. Le spectacle est beau et chaque composant joue l’harmonie des accords. Le Risotto de légumes verts, cuit à la perfection, avec oignons caramélisés, ail des ours et écume à l’ail, vient ensuite surprendre par la complexité des saveurs végétales, tandis que la présentation nous fait penser à un sous-bois généreux. Puis arrive le Filet de Pintade de Bresse de la maison Miéral, cuit sur le coffre, avec cuisse confite au jus et blettes façon «chou farci», le tout accompagné d’une sauce au vin jaune dont nous raffolons instantanément… Le dressage millimétré nous emmène cette fois sur des terres cultivées au cordeau, que nous parcourons avec délice: la viande est fondante, la déclinaison du légume totalement dépaysante, l’équilibre parfait. Chaque assiette est comme un paysage vu du ciel, du grand Yann Arthus-Bertrand versus Julien Laval. Les saveurs se mêlent et s’emmêlent sans être dénaturées, et tout est artistique juste avant que d’être exquis.
Bouquet final
Toujours guidés par notre amphitryon, nous passons haut la main l’épreuve «un fromage (de la Maison Mons) -un vin (avec modération bien entendu)». Une première pour nous, à reconduire au plus vite, tant les associations étaient pertinentes pour des palais avertis (le bénéfice de l’âge, sans doute). Le vin jaune qui succède au comté nous laisse en bouche de subtiles saveurs de noix, alors qu’un dessert très graphique se prépare. Le Crémeux au chocolat du Chef Pâtissier Frédéric Bailly approche, avec son sablé à la farine de maïs, son blanc-manger à la fève de Tonka et sa glace au chocolat blanc. Nous sommes visuellement redescendus sur terre, avec une présentation presque urbaine aux tracés impeccables. Le fondant côtoie le craquant, l’intensité la douceur. Nous ne laissons rien de rien dans nos assiettes, que seul un reste de contrôle nous retient de lécher. Quand les épilogues sucrés, ou mignardises, arrivent, nous nous inclinons devant cette table aux portes de Roanne, pour qui la création est une affaire de goût, de générosité et de déclinaisons culinaires sacrées.
Ouvert du mercredi au dimanche
2210, Route de Roanne, 42155 Ouches
04 77 72 52 67
06 21 71 70 92
www.chateaudorigny.com